Le 8 mars 2024, l’inscription de la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la Constitution française de 1958 est l’une des plus récentes avancées obtenues grâce aux luttes contemporaines pour les droits reproductifs. Elle s’inscrit dans une longue lignée de combats menés par les femmes pour le droit à disposer librement de leur corps en France, dont sont emblématiques la lutte pour le droit à l’avortement dans les années 1970, puis la promulgation de la loi du 17 janvier 1975, dite « loi Veil ».
L’accès aux droits reproductifs correspond à des réalités multiples et variées : la contraception, l’avortement (ou IVG), la procréation médicalement assistée, des soins de santé materno-infantiles de qualité ou encore une éducation sexuelle et affective complète.
Le dossier thématique de 2017 du Conseil de l’Europe sur les droits sexuels et reproductifs ainsi qu’un rapport complémentaire publié en 2024 révèlent que malgré les progrès accomplis, il persiste de nombreux défis et lacunes au sein des états membres. Ce dossier présente des recommandations visant à guider les états afin de respecter, protéger et mettre en œuvre ces droits, car il s’agit de leurs obligations internationales en matière de droits humains. Si le droit à l’avortement est un sujet fortement médiatisé, d’autres point de vigilance sont soulevés.
Parmi eux, est mise en avant la lutte contre les discriminations croisées envers les populations se trouvant à l’intersection de plusieurs oppressions (comme les personnes LGBTQIA+, handicapées, migrantes, les travailleur·euses du sexe, etc.), car leur accès à la santé et aux droits reproductifs sont limités en Europe. Par exemple, avant 2016 en France, une chirurgie génitale était imposée aux personnes transgenres pour accéder à la modification de la mention sexe à l’état-civil. Au-delà de témoigner d’une vision essentialiste et réductrice du corps confondant sexe « biologique » et genre, cette obligation a été dénoncée comme un processus de stérilisation forcée contraire aux droits humains.
Outre-Atlantique, le recul de ces droits a été marqué par la déconstitutionnalisation du droit à l’IVG aux États-Unis, en 2022, qui a conduit à son interdiction ou à sa restriction dans 21 États. Un rapport d’Amnesty International paru en août 2024 présente plusieurs témoignages de personnes rapportant les conséquences négatives de la privation de ce droit fondamental et rappelle qu’obliger une personne à poursuivre une grossesse non désirée, ou à rechercher des alternatives non sécurisées à l’avortement, correspond à une violation des droits humains.
En France, alors même que les avancées récentes comme l’inscription à la Constitution déjà citée ou l’allongement du délai légal de recours à l’IVG sont célébrées, il est important de rappeler qu’il persiste d’importantes inégalités d’accès à l’avortement selon la catégorie sociale et le lieu de vie des personnes concernées, ce qui interroge les moyens alloués à cet enjeu de santé publique.
Ce texte a été rédigé par des étudiant·es du master Études sur le genre
Références
- Amnesty International (2024), « Abortion in the USA: The Human Rights Crisis in the Aftermath of Dobbs ».
- Maad, A., Imbach, R. (2024), « Accès à l’IVG : dans la pratique, des obstacles perdurent en France », Le Monde.fr [en ligne].